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Et les artistes, alors ?

Bonjour à tous,

Le 26 mai dernier était votée à l’assemblée nationale un projet de loi relatif à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises qui ne manque pas de laisser perplexe.

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Si la finalité de la loi est de maintenir et de simplifier le régime des micro et auto-entreprises, il semble bien qu’un pan entier de la problématique ait été totalement perdu de vue.

Certes, la loi (déposée selon la “procédure accélérée”) n’a pas encore fini son chemin parlementaire, et il reste le Sénat.  Mais à trop accélérer, on risque parfois de grosses difficultés. Et  dans l’immédiat, l’orientation vers laquelle on se dirige est celle d’une fusion des régimes fiscaux de micro-entreprise et auto-entreprise. Si cela peut bien sûr rassurer les auto-entrepreneurs déjà installés, qui craignaient légitimement pour leur survie, de multiples questions se posent déjà sur le sort des artistes, toutes disciplines confondues.

Rappelons que s’il s’agit de généraliser à toutes les micro-entreprises le système existant pour les auto-entreprises, nous allons rapidement nous retrouver face à un obstacle de taille : comment feront les auteurs, sculpteurs, peintres etc. qui de leur côté ne dépendent PAS de l’URSSAF mais de l’Agessa et de la Maison des Artistes, organismes dont la fusion est annoncée à court ou moyen terme ?

Le régime fiscal de l’AUTO-entreprise, rappelons-le, n’est PAS ouvert aux artistes. Que se passera-t-il, dès lors, si la MICRO-entreprise disparait, pour être absorbée dans l’auto-entreprise ? Les artistes seraient-ils contraints d’opter de suite pour le régime de déclaration contrôlée ? OU devraient-ils, ce qui serait encore plus absurde, payer leurs charges sociales à l’Urssaf en lieu et place du précompte ? Outre les questionnements qui accompagnent nécessairement toute réforme (et plus encore lorsqu’elle est prise de façon “accélérée”), il semble réellement – sauf développements qui nous auraient totalement échappés – que le secteur artistique entier ait été oublié dans la bataille.

Une question a été posée conjointement par Eric HAINAUT, expert comptable spécialisé dans le secteur artistique et moi-même à l’auteur de ce projet de loi, afin de savoir ce qu’il adviendrait du secteur artistique.

Il serait intéressant aussi de savoir comment les organisations professionnelles représentant les artistes se positionnent sur la question. Intéressant.. et urgent !

Affaire à suivre de près, donc.. .de très très près.

Joëlle Verbrugge

16 commentaires sur cet article

  1. Merci Joëlle pour cette implication ! Nous autres photographes, nous qui dessinons la lumière, sommes aussi des artistes de plein droit.

    Affaire à suivre donc…

  2. à suivre effectivement. Ceci dit, je ne comprends pas en quoi il serait absurde que les artistes payent leurs charges sociales à l’urssaf au lieu du système du précompte (à charges égales évidemment) ?

    1. Les artistes n’ont en principe jamais affaire à l’URSSAF. Les charges sociales (nettement plus basses) sont précomptées.
      Si dans l’absolu on pourrait imaginer qu’un paiement se fasse ainsi, ce qui aurait au moins le mérite de simplifier cette question du précompte, le danger majeur est qu’aucune différence ne soit faite avec les artisans, de telle sorte que “cotisations égales”, dans votre phrase, correspondrait rapidement à une charge égale. Voire, à terme, à la disparition de la notion d’artiste. Dans ce cas, outre la suppression des spécificités de ces activités, ce sont des milliers d’artistes qui ne pourraient plus exercer leur activité professionnelles :
      . soit parce que les charges, trop lourdes, ne sont pas envisageables pour une activité si peu rentable
      . soit parce que d’éventuels cumuls seraient impossibles avec leur activité principale (le statut d’auteur reste pour cela privilégié, permettant un cumul dans des situations où le statut d’artisan ne serait pas envisageable).

      Je ne crois pas que ce soit le but du législateur. Par contre ce qui me sidère, ce que l’intégralité de la loi semble avoir été prise votée à la Chambre sans la moindre mention des spécificités de certaines activités, et sans mention, donc, de la nécessité de trouver des aménagements.
      On se dirige tout droit, si rien n’est vers une situation bancale.
      IL ne s’agit pas ici de contester l’utilité de la simplification pour les artisans, bien au contraire.
      Mais de relever que la population des artistes en France représente des dizaines de milliers d’individus dont rien ne justifierait qu’ils soient privés du droit de bénéficier d’un régime fiscal simplifié (micro-entreprise) qui leur était ouvert jusqu’ici, ou soient peu à peu absorbés par la grosse machine de l’URSSAF (et du RSI par voie de conséquence), ce qui anéantirait alors des décennies d’efforts pour obtenir et maintenir les avantages obtenus.
      Ces avantages ne sont pas un “privilège”, puisqu’ils sont d’autre part compensés par une absence quasi totale de couverture sociale (pour les assujettis) ou par la nécessité de devoir, annuellement, justifier de leurs revenus pour que soit maintenue leur affiliation (pour les affiliés, donc).

      Ais-je ainsi répondu à votre question ?

      Joëlle Verbrugge

  3. Merci Joëlle pour ces informations dont on ne parle pas dans la presse.
    Après les contrôles de l’INSEE que vous avez déjà évoqués, les 1,1 % de contribution jugés comme une contrainte par certains diffuseurs, et maintenant “l’oubli” des artistes dans ces réformes… Ne pensez-vous pas qu’on souhaite faire disparaître petit à petit un statut avantageux ?

    1. Ah ça…. les voies du législateur sont parfois impénétrables. A mon sens il s’agit plus d’une méconnaissance manifeste des particularités du régime des artistes.
      Mais il est évident que si la machine n’est pas remise sur les bons rails, on va au devant de quelques absurdités administratives….

  4. Merci pour l’info et le suivi de l’actualité…… Une question dans ton article m’interpelle: “Les artistes seraient-ils contraints d’opter de suite pour le régime de déclaration contrôlée ? OU devraient-ils, ce qui serait encore plus absurde, payer leurs charges sociales à l’Urssaf en lieu et place du précompte ?” j’ai démarré en micro entreprise et l’année suivante j’ai opté pour le régime de la déclaration contrôlée…… Quel inconvénient y vois-tu? Pour l’instant, je n’y trouve que des avantages…….

    1. Bonjour Sylvie,
      As-tu vu la longue réponse que j’ai donnée à un internaute qui demandait aussi ce qui posait difficulté ?
      La déclaration contrôlée en tant que telle a en effet des avantages (mais implique une compta détaillée que certains ne sont pas prêts à assumer).
      Le vrai risque est surtout d’imposer aux artistes un mode de perception des charges qui ne correspond pas à leur statut.
      Quand je vois, dans les dossiers, les difficultés que certains ont déjà à faire comprendre qu’avec leur code APE d’artiste ils n’ont pas à payer les forfaits classiques, et doivent pour cela faire face à des mises en demeure d’huissier, je crains de très grosses difficultés si l’on mélange l’ensemble.

      Joëlle

  5. Bonjour,
    Face à la menace qui pèse sur les artistes, je me suis permis de largement partager le lien vers votre billet de blog, et d’adresser au Président du sénat un mail où j’évoque le problème et fournit à nouveau le lien vers ce billet.
    Voici le texte de ce courriel :

    Monsieur le Président,
    Comme vous avez bien voulu accueillir avec bienveillance et donner suite à un précédent courriel de ma part, concernant la consultation européenne sur le droit d’auteur, je me permets de revenir vers vous à propos d’un nouveau problème auquel risquent de se heurter prochainement les artistes auteurs.
    J’ai appris récemment qu’était actuellement débattu au Parlement un projet de loi concernant les micro-entreprises et auto-entrepreneurs, afin de “simplifier” leurs statuts.
    J’attire votre attention sur les risques qu’encourent les artistes auteurs si ce projet de loi ne prend pas en compte leur situation particulière, notamment vis-à-vis des cotisations sociales.
    A cet effet, je me permets de vous transmettre ce billet de blog émanant d’une avocate et artiste photographe très au fait de ces questions :
    https://blog.droit-et-photographie.com/et-les-artistes-alors/
    Merci de bien vouloir lire le commentaire que l’auteur elle-même fournit à la suite du texte principal, et qui précise les risques encourus par nous faute d’un aménagement de cette loi.
    Bien cordialement,
    Christian Vilà, co-président du Syndicat des écrivains de langue française (S.E.L.F.)

    J’espère que vous ne m’en voudrez pas de vous avoir “utilisée” de la sorte.
    P.S.: j’ai aussi avisé sur le même sujet Nicolas Gary, d’ActuaLitté.

    1. Bonsoir,
      Votre interpellation auprès du Président du Sénat était un devoir , car les artistes ont souffert tellement du taux d’imposition perçu que nombreux fuient le pays pour s’installer dans d’autres pays où l’imposition est moins lourde.

  6. Excellente initiative Christian, face a cette très inquiétante proposition, avec a la base un manque de communication entre le GNPP et l’UPP, et le ministère de l’artisanat et de la Culture… Il faudrait que ce dernier arrive à comprendre qu’actuellement un auteur photographe est souvent obligé d’avoir plusieurs activités créatives complémentaires… pour réaliser ou diffuser ses œuvres personnelles ou de commandes en essayant de survivre. Entièrement lié à la prise de vue, on demande souvent la création d’une affiche, d’un site internet, postproduction et chromie pour suivre auprès des imprimeurs nos créations, d’autres photographes très accessoirement font des prestations en stages ou des conférences… éditent à compte d’auteur… Si l’on veut simplifier l ‘activité de “photographe” auteurs inclus; il ne faudrait pas seulement voir que du côté des autoentrepreneurs et micros entreprises, mais aussi que le statut d’auteur photographe englobe toutes les créations visuelles dérivées, et leurs développements. L’agessa refusait à un moment, la vente des tirages réalisés par l’auteur lui même… pourquoi d’ailleurs limiter fiscalement à 30 exemplaires ” le ne parle pas de labo industriel mais dans certaines régions la mienne incluse ils ne savent même pas ce qu’est un tirage photo, ils parlent de posters ou de tableaux si les photos sont encadrées” vu les difficultés actuelles il n’est pas a mon avis envisageable d’avoir x statuts ou passer son temps à ventiler des opérations sur diverses caisses… pour des montants dérisoires la plus part du temps…

    1. Hervé : et encore, si il s’agit de 30 exemplaires pour les photographes, la Maison Des Artistes limite à 8 exemplaires les tirages de peintures numériques (par exemple)…
      Merci en tous cas pour ce billet et les intéressants commentaires suivants.

  7. Bonjour Joëlle,
    Pour un artisan assujetti à la TVA qui pratique des séances de prises de vues de particuliers avec vente de tirages numérotés, datés, signés dans la limite de 30 ex. Si ces tirages peuvent être considérés comme des œuvres de l’esprit et le photographe un artiste, exposant, tenant un registre (merci de préciser les obligations de ce registre), la facture (j’ai vu que l’artisan ne devait pas émettre de notre d’auteur) doit-elle comporter deux taux de tva, un de 20 % pour la séance et un de 5.5% pour la vente ? J’avait vu il y a quelques années que parallèlement quand on faisait une cession de droits, la tva de la cession l’emportait sur la tva de mise en oeuvre et réalisation et frais techniques. ou bien réaliser deux factures. Merci pour votre réponse. Bien cordialement, Christian

    1. Bonjour,
      Si les tirages répondent à la définition fiscale de l’oeuvre d’art, la TVA sera toujours de 5,5% pour tout vendeur assujetti à la TVA, quel que soit son statut…
      Vous aurez tous les détails à ce sujet dans mon livre “Vendre ses photos”.
      Cordialement ,
      JV

  8. Bonjour Joëlle, j’avais deux questions, la première: J’ai acheté votre livre vendre des photos l’édition 2012 2 ème version que j’ai trouvé très clair et utile. Est-il possible d’avoir une mise à jour web vers la dernière version ou dois-je racheter un livre? Sinon j’avais une question concernant la tva sur la vente d’oeuvre d’art -limitée à 30 ex. Signée- via une galerie d’art. J’ai lue que cette tva serait à 20 pour cent, et non 5,5%… Cela me paraît beaucoup, en sachant que la galeriste me prends elle-même 50% sur la vente… Est- ce comme cela? Bien cordialement, Sandrine

    1. Bonjour,
      Désolée, pas de maj web… les modifications sont énormes entre l’édition 2 et l’édition 4… la loi change sans cesse, et l’ouvrage est en permanence remodelé et réorganisé..
      20%
      D’autant plus qu’elle n’est en principe elle-même taxée que sur sa marge bénéficiaire…

      Cordialement,

      Joëlle Verbrugge

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