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Lutte contre le travail dissimulé et la concurrence déloyale

Bonjour à tous,

Je reviens vers vous pour un peu de veille législative, qui va intéresser tous ceux qui vendent des photos (ou quoi que ce soit d’autre) par le biais de plateformes en ligne, ainsi bien sûr que tous les exploitants de ces mêmes plateformes.

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Afin de lutter contre le travail dissimulé, et partant du constat incontestable que l’internaute semble avoir du mal à se plonger dans les obligations fiscales et – pour certains – à imaginer même qu’il est tenu à certaines contraintes, le législateur a adopté fin décembre une mesure qui sera en vigueur à partir du 1er juillet 2016.

C’est en effet au sein de la Loi de Finances pour 2016 (Loi n°2015-1285 du 29/12/2015) que fut inséré un article 87, qui prévoit des modifications de diverses dispositions. Comme d’habitude, il faut se prêter à un petit jeu de piste pour y voir clair, puisque l’article en question modifie le Code Général des Impôts, le Livre des Procédures fiscales et le Code de la sécurité sociale.

Bref, je vous ai donc synthétisé les informations qui peuvent se résumer comme suit :

1) Tout d’abord, les entreprises qui mettent en relation des personnes à distance, « en vue de la vente d’un bien, de la fourniture d’un service ou de l’échange ou du partage d’un bien ou d’un service » seront tenues à compter du 1er juillet 2016 de fournir deux types de documents :

A l’occasion de chaque transaction, une information « loyale, claire et transparente » sur les obligations fiscales et sociales incombant aux personnes qui réalisent des transactions commerciales par leur intermédiaire. Ces informations devront être accompagnées de liens vers les sites officiels permettant de se conformer aux obligations fiscales ou sociales

En janvier de chaque année, un récapitulatif des montants bruts des transactions perçues par les internautes à leur intermédiaire pendant l’année écoulée.

(Voir à ce sujet Art. 242bis du CGI)

Ceci vaudra pour tous les utilisateurs résidant en France, ou réalisant des ventes ou prestations de service en France.

2) Ces mêmes entreprises devront faire certifier par un « tiers indépendant » le respect de ces obligations (Art. 242bis, dernier alinéa).

Lorsque ce certificat ne sera pas établi, les agents de l’administration fiscale pourront établir un PV consignant le manquement, et appliquer une amende prévue par le CGI et qui sera applicable à défaut pour la plateforme de régulariser sa situation dans un délai de 30 jours (Art. L80P du Livre des Procédures Fiscales)

3) Finalité de la mesure

Comme cela ressort du premier des articles que j’ai cités, le champ d’application est très large.  Et ceci est en outre à mettre en parallèle avec une jurisprudence récente dans laquelle un particulier, qui avait vendu sur une plateforme (Priceminister) pour plus de 200 € par mois de matériel high tech (auquel son travail salarié lui donnait droit) avait été condamné, la juridiction saisie estimant qu’il s’agissait là de ventes qui n’étaient pas anecdotiques et constituaient bien un revenu devant faire l’objet d’une déclaration aux impôts (TI 2ème arr. Paris, 7/9/2015). Le vendeur avait été considéré comme professionnel, avec toutes les conséquences que vous pouvez imaginer.

Le but premier est donc bien de lutter contre le travail dissimulé.

Par ailleurs, la mesure est également susceptible d’avoir une influence au niveau de la concurrence déloyale. Que penser en effet d’un vendeur qui serait ainsi qualifié de “professionnel” mais qui  – ce que la loi vise précisément à éviter – ne paiement jamais d’impôts ni de charges sociales sur ces montants payés en toute discrétion par la plateforme…  A l’heure du “pas vu, pas pris”, il y a fort à parier que cela pourra faire grincer les dents de certains…

4) En pratique

En pratique, toutes les plateformes permettant notamment de vendre des tirages photographique, ou les plateformes de crowdfunding seront concernées ainsi, nous l’avons vu, que tout système mettant en contact à distance des internautes même pour l’échange ou le partage de produits ou de services..

Restera à savoir comment valoriser (si cela est exigé ?) un tel échange….

Nous n’avons sans doute pas fini d’entendre parler de cette loi et de sa mise en oeuvre.

A très bientôt

                                  Joëlle Verbrugge

12 commentaires sur cet article

  1. Prenons un exemple : Je suis photographe amateur, je réalise un livre-photos chez Blurb. Intéressés par un si bel ouvrage, mes amis veulent l’acheter. Je le mets en vente et je rélise un petit bénéfice. Et c’est tout pour cette année. Blurb aura l’obligation de remonter l’info au fisc ?

    1. Voilà tout à fait.. du moins si blurb a une structure en France, car sinon elle n’est pas tenue par cette loi…

      Sachant par contre que ceci est considéré comme une opération commerciale, puisque Blurb n’est pas un éditeur qui vous verse des droits d’auteur, donc déjà risqué à l’heure actuelle.
      Regardez à ce sujet un article que j’avais publié dans Compétence photo….
      Dans tous les cas il faut déclarer les montants..
      Et sachant qu’une telle plateforme technique n’est pas éditeur, ce n’est en principe pas autorisé pour un non-professionnel, et même pour un auteur (sauf pour ce dernier s’il s’agit de livres numérotés et signés dans la limite de 30 ex).

  2. Bonjour Joëlle,
    Cet article vient à point pour compléter votre ouvrage “Le Photographe et son Modèle” !
    Au passage, je l’ai dévoré en 3 jours ! Félicitations pour l’énorme travail que vous avez fourni.
    Pour en revenir à notre sujet, ça risque de grincer des dents sur les plateformes comme “Book.fr”, “BookFoto”, “Kabook.fr”, etc. ! Tant pour les photographes qui e font rémunérés (ne serait-ce que pour les mariages) que pour les modèles “Freelance” (et en agences !)…
    Je me doutais depuis quelques années que le Fisc, qui -avouons-le – laissait proliférer ces activités, allait réagir sur un “marché” en développement…
    Bisesss
    François Jx

    1. Merci pour ce retour concernant mon bouquin… n’hésitez pas à relayer partout, cela peut intéresser d’autres personnes et plus l’éditeur récemment créé pourra développer sa collection, plus je pourrai de mon côté vous proposer des contenus fréquents et variés..

      Pour ce qui est de l’article du jour, ça va concerner des dizaines de milliers de personnes, d’eBay à Priceminister, de plateforme de vente de tirages en ligne aux sites que vous évoquez etc…
      Mais il est en effet normal qu’on aille en ce sens…

      Joëlle

  3. Bonjour Joelle,

    Je me permets de vous écrire car dans l’annonce google il y a inscrit que vous avez sorti un livre “qui va intéresser tous ceux qui vendent des photos (ou quoi que ce soit d’autre) par le biais de plateformes en ligne, ainsi bien sûr que tous les exploitants de ces mêmes plateformes”.
    Qu’elle est le nom de ce livre ? SVP.

    Merci d’avance.

  4. Une mesure de plus pour lutter contre le travail tout court…

    Un jour ces technocrates de malheur comprendront que toutes ces lois ne font qu’empêcher les gens de vouloir gagner de l’argent.
    Pourquoi ne peuvent-ils pas faire quelque chose de simple avec une taxe à la source et qui comprennent tout.
    Plus besoin de déclaration, d’inscription à tel ou tel organisme…

    Pourquoi tout faire pour interdire ces plate-formes comme blurb à des “non-professionnels” ?

  5. Bonjour,
    La lecture de l’article m’interpelle sur un sujet qu m’intéresse. Tout d’abord vous parlez de de livres numérotés et signés dans la limite de 30 ex. J’ai un statut d’auteur photographe et je me demandais justement si la réalisation de livres ou éventuellement de calendriers signés numérotés et limités à 30 exemplaires était autorisée…vous semblez suggérer que oui ? Est ce les même conditions que pour un tirage d’art ?

    Dans ce cas, est ce légal de financer ce genre de projet via une plate forme de crowdfunding ? Faut il respecter des règles particulières ?

    Enfin dernière question dans le même esprit, est il possible de mettre en vente/financer des tirages d’arts via plateforme de crowdfunding en restant dans la légalité ?

    Merci pour les précisions sur ces 3 cas concrets.

    1. Bonjour,
      Oui un livre photo numéroté et signé dans la limite des 30 ex (comme un tirage) peut être vendu en tant qu’auteur, avec la même fiscalité qu’un tirage d’art.
      vous retrouvez tout ça, dès qu’il sortira, dans mon ouvrage “Vendre ses photos” (édition 5 en cours pour 2018).
      Rien ne s’oppose légalement à ce que la plateforme serve pour les préventes des 30 ouvrages.
      Je suis plus sceptique par contre sur l’utilisation de cette même plateforme de CF pour des tirages d’art. Vous avez des sites dédiés qui sont plus adaptés à ce genre de ventes,en prévoyant un tirage uniquement quand il y a une vente.
      Bien à vous

      JV

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