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La musique et l’image : un beau mariage !

Bonjour

Lorsqu’il nous arrive, comme photographes, de réaliser des diaporamas ou autres montages animés à l’aide de nos photographies, se pose rapidement la question de la bande sonore.

Pour ma part, j’ai “résolu” le problème en collaborant avec un ami, auteur-compositeur de blues dont j’apprécie la musique, et à qui je demande systématiquement son accord, en rappelant bien entendu son nom à chaque utilisation d’une de ses chansons, et en renvoyant à son site internet.

Mais au vu des règles très particulières qui s’appliquent en la matière, j’ai proposé à un de mes confrères, plus habitué aux litiges relatifs à la propriété intellectuelle des oeuvres musicales, de nous expliquer l’état actuel des règles en la matière : droit moral, droit de synchronisation, utilisation de l’oeuvre ou modification de celle-ci….

Toutes des notions que doivent garder à l’esprit les photographes au moment de mettre en musique leurs propres créations.  Car il va de soi, bien sûr, qu’il n’est pas question d’utiliser les photos d’autrui sans l’accord de leur auteur, mais ceci est une autre question.

Revenons à notre musique…

Je laisse la parole (ou plutôt la plume) à Me Nicolas REBBOT, avocat au Barreau de Paris, que je remercie vivement pour son utile contribution au blog.

« LA MUSIQUE ET L’IMAGE : UN BEAU MARIAGE ! »

 

Le titre de cet article n’est évidemment pas anodin.

Il est aujourd’hui en effet des plus courants d’allier le visuel et l’auditif, une ou des images (fixes ou animées) et un son, ou plus singulièrement, une musique.

Originale ou préexistante, celle-ci sert évidemment à illustrer un film, un diaporama, ou autre, pour rendre la chose plus attractive et créer un ensemble artistique, une œuvre nouvelle, née de l’alliance de 2 autres œuvres distinctes.

J’évacuerai la question tenant à l’alliance d’une musique, originale, commandée expressément par le producteur des images, avec celles-ci.

En effet, il y aura ici classiquement un contrat de commande passé avec le compositeur et l’auteur (le cas échéant) de la musique, avec une cession de droits et une rémunération proportionnelle négociée. Si cet ensemble artistique doit faire l’objet d’une exploitation assez large, la gestion de l’exploitation collective sera confiée à la SACEM pour plus de simplicité, si tant est que les créateurs de l’œuvre musicale commandée spécialement sont membres de cette société de gestion.

Revenons à mon titre.

Lorsqu’il s’agit d’une musique préexistante, son alliance avec des images n’est pas sans conséquences juridiques et nécessitent bien entendu une clarification des droits qui supposent le plus souvent un paiement de redevance aux ayants-droit de cette musique.

Il s’agit donc bien d’un mariage puisque le consentement des ayants-droit de la musique est nécessaire. Ce consentement est évidemment rarement gratuit et suppose le versement d’une contrepartie financière…

Il faut donc bien organiser un beau mariage !

La mise en œuvre d’un tel mariage s’appuie sur la notion, couramment appelée par les praticiens, du droit dit de « synchronisation ».

Ce droit ne dispose, en droit français, d’aucune existence juridique.

Il est une déclinaison, sémantique en quelque sorte, du droit de reproduction, attribut du droit patrimonial de l’auteur.

Les contrats permettant l’incorporation d’une musique au sein d’une œuvre audiovisuelle (images fixes ou animées) présentent diverses formes allant du simple échange de lettres au contrat autorisant formellement la fixation de l’œuvre musicale à des fins cinématographiques, publicitaires…

Encore faut-il savoir avec qui conclure ces contrats ou alors à qui s’adresser pour synchroniser une ou des musiques préexistantes avec une œuvre audiovisuelle ?

En cas d’utilisation d’une œuvre musicale préexistante pour sonoriser une œuvre audiovisuelle, les éditeurs de musique (cessionnaires des droits patrimoniaux du compositeur et/ou de l’auteur via un contrat de cession et d’édition d’œuvre musicale) perçoivent une rémunération au titre du droit de « synchronisation », partagée avec l’auteur et/ou le compositeur selon la clé de répartition stipulée au contrat, qui constitue la rémunération de l’autorisation d’incorporer une musique préexistante dans une œuvre audiovisuelle.

Cette rémunération est devenue une manne financière très importante pour les éditeurs musicaux qui, par l’évolution des habitudes des consommateurs et la crise du disque, ont vu leurs rémunérations tirées de la vente de disques et de partition significativement diminuées[1].

Cette autorisation de synchronisation présuppose, évidemment, l’accord de l’auteur et/ou du compositeur au titre de son droit moral, l’œuvre étant fréquemment réduite dans sa durée ou arrangée musicalement pour tenir compte  des contraintes de l’œuvre audiovisuelle seconde.

Ainsi, les éditeurs de musique seraient-ils ainsi les interlocuteurs privilégiés des utilisateurs qui souhaitent synchroniser des musiques préexistantes éditées par ces premiers avec une œuvre audiovisuelle ? Pas si simple.

LES CONTROVERSES

Pour certains utilisateurs de musique et pour la SACEM, la synchronisation d’œuvre audiovisuelle par des musiques préexistantes, lorsque celles-ci sont diffusées en fond sonore sans modification ni altération, ne mettrait en œuvre que le droit de reproduction mécanique, droit apporté par les auteurs/compositeurs et les éditeurs à la SACEM.

Dès lors, il en résulte que, sous réserve du paiement des redevances à la SACEM et du respect du droit moral des auteurs/compositeurs, et à l’exception des œuvres publicitaires[2], toute utilisation d’une œuvre musicale préexistante pour sonoriser une œuvre audiovisuelle serait licite, sans qu’il soit besoin d’obtenir l’autorisation préalable des éditeurs de ces musiques.

Pour les éditeurs de musique, au contraire, toute incorporation d’une œuvre musicale dans une œuvre audiovisuelle met en œuvre des droits qui leur appartiennent en propre, ceux-ci se prévalant d’un droit d’adaptation ou d’aménagement des œuvres, d’un droit de fragmentation, ou encore de l’existence d’une œuvre composite, définie par l’article L.113-2 du Code de la propriété intellectuelle comme « l’œuvre nouvelle à laquelle est incorporée une œuvre préexistante sans la collaboration de l’auteur de cette dernière ».

Le Code de la propriété intellectuelle ne reconnaît en effet aux auteurs, au titre des droits d’exploitation, qu’un droit de représentation et de reproduction, auxquels s’ajoutent un droit d’autoriser « la traduction, l’adaptation ou la transformation, l’arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque »[3].

Toutefois, aucune de ces dispositions n’institue expressément au bénéfice des auteurs et de leurs ayants droit un droit de « synchronisation », dont l’existence relève uniquement d’usages professionnels.

Cet usage ne donne pas lieu à contestation, d’autant plus que l’éditeur dispose de la faculté, lors de son adhésion à la SACEM, de ne pas faire apport du droit de reproduction mécanique de ses œuvres dans des films cinématographiques, et qu’en pratique, cette société de gestion renvoie généralement le producteur cinématographique vers l’éditeur concerné lorsqu’elle reçoit une demande portant sur la reproduction d’une musique préexistante dans un film.

Cette analyse paraît confirmée par la Cour d’appel de Paris, qui a jugé, dans un arrêt du 19 septembre 2001, que « l’intégration dans une œuvre cinématographique ou audiovisuelle d’une composition musicale implique que le consentement de l’auteur, de l’éditeur ou de toute autre ayant cause ou ayant droit détenant un droit sur la composition concernée ait été recueilli »[4].

Il n’est pas contestable que lorsque l’œuvre musicale a fait l’objet de modifications intrinsèques (modification des paroles et/ou de la mélodie, du rythme, ou de l’harmonie), l’incorporation de celle-ci dans une œuvre audiovisuelle nécessite, outre le consentement de l’auteur/compositeur au titre du droit moral, le consentement préalable de l’éditeur.

En revanche, en cas d’incorporation sans modification intrinsèque d’une œuvre musicale dans une œuvre audiovisuelle, non seulement la jurisprudence n’a jamais reconnu aux éditeurs l’existence d’un droit de « synchronisation », mais elle n’admet également l’exercice des droits éditoriaux que dans des hypothèses très circonstanciées, principalement en cas d’utilisation publicitaire.

On rappellera  à ce titre avec quelle sévérité la jurisprudence est intervenue en matière d’exploitation publicitaire d’une œuvre musicale[5].

LES SOLUTIONS FIXEES PAR LA JURISPRUDENCE

La solution est donc simple : si l’œuvre musicale n’a pas subi de transformation, de modification ou d’arrangement, alors son transfert sur support audiovisuel constitue une reproduction[6]. L’autorisation doit être sollicitée auprès de la SACEM.

En revanche, si cette incorporation a nécessité des modifications, alors il s’agit d’une adaptation[7]. C’est donc auprès de l’éditeur de l’œuvre musicale qu’il faudra solliciter l’autorisation nécessaire.

Si l’autorisation de l’éditeur de l’œuvre musicale peut apparaître nécessaire pour un karaoké, ce n’est pas au titre du droit d’adaptation puisqu’il n’y a pas de modification des paroles ou de la musique mais eu égard au fait que le droit de représentation graphique des paroles appartient au droits patrimoniaux cédé par leur auteur (il existe ainsi pour l’exploitation des partitions) et n’est pas apporté au titre du droit de reproduction mécanique à la SACEM.

Les producteurs de karaoké ne doivent pas oublier le droit moral. La jurisprudence apparaît aujourd’hui plus prudente qu’avant, les juges admettant que l’atteinte au respect de l’œuvre musicale (prérogative du droit moral de l’auteur) n’est pas systématique[8].

L’incorporation d’une œuvre musicale dans une œuvre audiovisuelle ne porte donc pas en soi atteinte au droit moral. Il reste donc prudent de demander aux auteurs leur accord pour cette forme d’exploitation de leurs œuvres.

J’ajoute que, en matière de jeux vidéo, la pratique du « buy out » s’est développée. Elle consiste en une acquisition de droits définitive contre une rémunération forfaitaire. Dans le cas de productions étrangères, cette acquisition de droits est possible sous le régime du « copyright ».

En France, elle se heurte à la gestion collective, de sorte que les compositeurs français sont peu nombreux à intervenir dans ce domaine : soit les producteurs évitent les compositeurs français pour éviter la gestion collective, soit ils font appel à des compositeurs qui ne sont pas adhérents à la SACEM et auxquels ils font conclure des cessions forfaitaires.

La question est très sensible dans ce secteur, les auteurs et compositeurs ayant tendance à accepter ces conditions, faute de quoi une opportunité leur échapperait.

Mais, ils perdent alors le bénéfice d’une rémunération proportionnelle à leur exploitation de leur œuvre, ce qui est un risque important alors que l’exploitation des jeux vidéo peut donner lieu à un décuplement important des ventes.

Cette pratique pose également des questions de droit moral, l’identité même du compositeur n’étant généralement pas mentionnée sur les jeux quand il y a « buy out », ce qui porte atteinte au droit au nom (prérogative issue du droit moral du créateur).

IN CONCRETO

Après ces développements de nature à alimenter votre culture juridique, il est intéressant de voir comment il convient de procéder en pratique afin d’être juridiquement irréprochable, si vous souhaitez illustrer par une musique préexistante des images fixes ou animées, un site internet…dans les conditions ci-dessus citées (adaptation, altération de l’œuvre musicale ou non).

Un certain nombre d’outils peuvent dès lors vous y aider :

– pour connaître les ayants-droit d’une œuvre musicale appartenant au répertoire de la SACEM : http://www.sacem.fr/oeuvres/oeuvre/index.do vous permettra une recherche par titre, auteur, compositeur ou éditeur de la ou des musiques souhaitées (attention cette base de données n’est pas forcément complètement à jour eu égard aux nombreuses cessions de catalogues qui peuvent avoir lieu entre maisons d’édition musicale et qui  ne sont pas forcément renseignés « up to date » par les services de la SACEM)

– pour connaître le coût de l’illustration musicale d’un site internet quand la musique souhaitée ne subit aucune modification intrinsèque, le lien suivant vous permet de connaître les ordres de grandeur des redevances qui vous seront demandées ; ceux-là sont généralement assis sur le nombre de pages vues par mois (PAVM) du site en cause : http://www.sacem.fr/cms/home/utilisateurs/internet-multimedia/illustration-sonore-site-web/tarifs-illustration-sonore-de-site-web (la SACEM renvoie à la société de gestion SESAM dont la mission est de gérer les droits des auteurs multimédia en agissant comme guichet unique en tant que représentant des autres sociétés de gestion collective : SACD, ADAGP, SACEM, SCAM).

Vous disposez désormais de la recette indispensable pour faire un beau mariage de la musique et de l’image sans vous faire taper sur les doigts par le père de la mariée !

Nicolas Rebbot
Avocat à la Cour
10 rue Saulnier
75009 Paris



[1] selon une enquête menée par Ernst & Young, les droits de « synchronisation » fournissent la part dominante des revenus que les éditeurs tirent des autres droits que les droits SACEM, passant de 58 à 64 % entre 2006 et 2007, mais restant bloqués dans un volume de 18,5 à 18,4 millions d’euros

[2] La jurisprudence étant fixée sur ce point depuis longtemps : CA Paris, 12 sept.2001, Charles Talar c/Lannier, à propos de l’utilisation de la chanson « Femme libérée » : « une agence de publicité et le coauteur d’une chanson sont tenus, pour réaliser un spot publicitaire à partir de la musique de la chanson, lequel constitue une œuvre dérivée, de solliciter le consentement des éditeurs titulaires des droits de reproduction et de représentation de l’œuvre première…et ce, quelle que soit la durée du spot ».

 

[3] Article L.122-4 du Code de la propriété intellectuelle

[4] CA Paris, 19 septembre 2001, Orphée c/ cohérie Brel, Editions Pouchenel et Warner Chapell

[5] En effet, suite à un contrat d’édition musicale passé par Didier Barbelivien et Gilbert Montagné, qui avaient accepté que le cessionnaire des droits soit autorisé à utiliser l’œuvre à des fins publicitaires, y compris en y apportant toutes modifications utiles ou toutes adaptations, la cour d’appel de Paris avait estimé que les auteurs ne pouvaient invoquer une atteinte au droit moral lorsque la chanson « On va s’aimer » était devenue « On va fluncher » (avec modification des paroles) pour la campagne publicitaire d’une société de restauration (CA Paris, 28 juin 2000, Didier Barbelivien et Gilbert Montagné c/ Sté Agence Business et autres). La première chambre civile avait cassé cette décision en rappelant le principe d’inaliénabilité du droit moral (Cass. 1re civ., 28 janv. 2003). Sans vouloir contredire cet arrêt, la Cour de renvoi exigeait la preuve de l’atteinte au droit moral dès lors que les modifications avaient été autorisées (CA Paris, 15 déc. 2004). La Cour de cassation a de nouveau cassé cette décision au motif que “toute modification, quelle qu’en soit l’importance, apportée à une œuvre de l’esprit, porte atteinte au droit de son auteur au respect de celle-ci” (Cass. 1re civ., 5 déc. 2006). La cour de renvoi s’est inclinée (CA Versailles, 11 oct. 2007) et la première chambre civile a rejeté un dernier pourvoi dans les mêmes termes que dans son précédent arrêt : “L’inaliénabilité du droit au respect de l’œuvre, principe d’ordre public, s’oppose à ce que l’auteur abandonne au cessionnaire de façon préalable et générale, l’appréciation exclusive des utilisation, diffusion, adaptation, retrait, adjonction et changement auxquels il plairait à ce dernier de procéder” (Cass. 1re civ., 2 avr. 2009).

[6] En ce sens également à propos de bande-annonce télévisée, CA Paris, pôle 5, 2e ch., 23 oct. 2009

[7] CA Paris, pôle 5, 2e ch., 19 mars 2010, SARL Saga Communication c/ Cie Nationale Royal Air Maroc et Universal, inédit : sonorisation d’une bande-annonce publicitaire qui avait nécessité de légères modifications apportées à l’œuvre musicale notamment à son orchestration

[8] retenant l’atteinte au droit moral, CA Paris, 14 mars 2001– Rejetant l’atteinte au droit moral, CA Paris, 4e ch., sect. B, 23 janv. 2004 – Comp. Cass. 1re civ., 7 nov. 2006

5 commentaires sur cet article

  1. Commentaire laissé par RioBravo le 29/12/2011

    Bonjour (encore moi).

    Voilà un sujet passionnant, comme toujours traité de façon claire et précise, utile à beaucoup de vos lecteurs, qui sont souvent des blogueurs. Cette fois, c’est pourquelques questions complémentaires.

    Je prendrai mon cas, l’un des plus banaux (ou banals, les deux sont licites) : j’entretiens un blog personnel, sans aucun but lucratif ou professionnel, ni offres de téléchargements. Si je veux l’illustrer de musiques, le site du Sesam, filiale de la Sacem, m’indique que le tarif est modique (2 € HT par mois, pour dix oeuvres) et qu’il suffit de remplir un formulaire “simplifié” en ligne quoiqu’aussi simple, en réalité, qu’une demande de visa touristique pour la Corée du Nord). Bien.

    Encore faut-il savoir précisément si la musique convoitée est grevée de droits et susceptible de redevance. L’article de Me Rebbot indique le lien d’une base de données. Mais prenons l’exemple d’un Nocturne de Chopin. Cela me semble du domaine public. Un éditeur peut-il arguer néanmoins qu’il en possède les droits, d’une façon ou d’une autre ?

    Si l’interprète est identifié, je suppose que lui (ou des ayants droit) ont des titres à faire valoir. Mais allez donc identifier un pianiste parmi des centaines… Même si on m’affirme qu’on a reconnu Rubinstein, ce peut être contestable, en tout cas contesté. Et si c’est Léonard Corchepot, troisième prix du conservatoire de Rodez en 1967, je suppose que le pauvre aura bien du mal à se faire reconnaître… Y a-t-il une sorte de présomption de propriété qui s’imposerait aux utilisateurs ?

    Il ne s’agit pas pour moi d’apprendre comment jouer au plus fin avec le droit de la propriété intellectuelle, j’en suis un défenseur inflexible, et je ne publie que mes propres textes, avec mes propres photos. Mais existe-t-il des jurisprudences sur ces cas limites ? Et quelles sont les peines encourues ou les indemnités généralement allouées à la Sacem en cas de fraude manifeste ? Sont-elles dissuasives ? J’abuse sans doute, pardonnez-moi, mais c’est toujours intéressant à savoir.

    Merci et bien cordialement.

    1. Réponse de Nicolas Rebbot le 29/12/2011

      Votre question est fort intéressante et vous l’avez bien abordée.

      En effet, pour Chopin qui est tombé (comme on dit) dans le domaine public, point de problème de droits patrimoniaux, pas plus de droit moral (si son oeuvre est reprise telle quelle pour sonoriser votre site) mais en effet quid des droits “voisins”, ceux de l’interprète et de son producteur.

      Et dans ce cas, ce n’est pas à une société d’auteurs (SACEM ou SESAM) que vous devez avoir à faire, mais à une société de producteurs (SPPF, SCPP, SPPA) ou bien d’artistes-interprètes (SPEDIDAM, ADAMI…), mon conseil serait donc de vous rapprocher d’une de ses sociétés pour connaître les coûts d’une telle sonorisation.

      Evidemment sans l’identité de l’interprète et de son producteur, cela risque de vous compliquer la chose, mais afin de prouver votre foi la plus bonne possible, vous pourriez en l’absence de ces renseignements constituer une sorte de “réserve”, assise sur les montants fixés par la SACEM par exemple, afin de pouvoir régler les ayants-droit des l’interprète ou de son producteur s’il vient un jour à se manifester auprès de vous pour réclamer une juste rémunération pour l’exploitation de son travail….

      Voilà comment faire preuve de la plus grande prudence juridique.

      Je vous rappelle toutefois que la protection légale des enregistrements phonographiques s’éteignaient 50 ans après la date de leur première fixation mais que désormais, depuis une directive européenne récente, cette durée a été alignée sur celle des droits d’auteur à 70 ans (toujours après la date de première fixation…)

      Nicolas Rebbot

  2. Commentaire laissé par RioBravo le 31/12/2011

    Rebonjour !

    Pardon de revenir sur le sujet et de vous envahir une nouvelle fois, mais un détail m’avait échappé, et le rappel sur le délai de 70 ans, fait par Me Rebbot, m’inspire quelques autres question.

    Comme j’ai 65 ans et que je ne me vois pas vieillir, j’ai encore l’impression que 70 ans, c’est le début du XXème siècle. Or c’est 1941 ! Sans remonter aux enregistrements sur rouleaux d’Aristide Bruant, qu’en est-il alors des dizaines de milliers de musiques enregistrées dans les années 1920 et 30, et disponibles sur de multiples supports, 78-tours y compris (Vincent Scotto a composé plus de trois mille chansons à lui seul) ?

    Elles sont parfois reprises en compliations sur des coffrets de CD, et cela confère-t-il des privilèges particuliers aux éditeurs ? S’ils en ont acheté les droits lorsqu’ils étaient négociables, en demeurent-ils propriétaires ?

    Un fait particulier me revient, parmi d’autres : les héritiers de Marcel Pagnol ont fait démonter de Dailymotion (qui a conclu, d’ailleurs, un accord général avec la Sacem) tous les extraits de films signés par leur aÎeul, leur grand-père en l’occurrence, et se chargent eux-mêmes de la commercialisation de ces films. Or la plupart d’entre eux, la Trilogie marseillaise en particulier, sont bien antérieurs à 1941. Quant aux pièces de théâtre correspondantes, elles datent des années 20.

    En conclusion, les enregistrements d’avant-guerre de Mistinguett, Edith Piaf, Georgius, Maurice Chevalier, etc., sont-ils dans le domaine public ? Comment s’explique cette permanence des droits que font valoir certains héritiers pour des oeuvres vieilles de quatre-vingts ans (je ne parle pas des droits moraux mais bien commerciaux)? Le couperet des 70 ans est-il absolu ou comporte-t-il des exceptions ?

    Merci d’avance,

    Bien cordialement et… meilleurs voeux pour 2012, après-demain.

    1. Réponse de Nicolas Rebbot le 31/1/2012

      Rebonjour,

      Question toujours pertinente. Difficile d’y répondre d’un trait.

      Pour aller au plus simple, il n’existe aucune exception pour les droits “voisins” relatives à la durée de protection passée de 50 à 70 ans selon norme européenne, comme elle peut exister pour les droits d’auteur avec le mécanisme des prorogations du guerre.

      Concernant les oeuvres cinématographiques ou théâtrales, considérées comme des oeuvres dites de “collaboration” par le droit d’auteur eu égard à la participation de plusieurs auteurs à sa réalisation (scénariste, auteur de l’oeuvre littéraire adaptée, auteur de l’adaptation, réalisateur, metteur en scène…), la durée de protection des droits d’auteur expire 70 ans après la mort du dernier co-auteur.

      Concernant le cas des oeuvres audiovisuelles de Pagnol, je ne peux me prononcer, ne connaissant pas exactement les tenants et les aboutissants de cette affaire…

      Bonne fin d’année!

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